‘Echos’ est une série documentaire qui entend montrer et raconter la musique autrement, hors du champ promotionnel et commercial. Autoproduite par Murailles Music, elle a été imaginée et menée par son directeur artistique Julien Courquin. Elle se propose de donner la parole aux musicien·nes de notre Eco- (* du Grec ‘οίκος’ : maison, foyer), qui ne sont ni des icônes, ni des stars dans l’industrie du disque mais une constellation d’artistes intempestifs, singuliers, dont la pratique souvent idiosyncratique, parfois phénoménale, se réalise au long cours, de façon quasi rituelle, moins comme l’élaboration de « projets » que comme une prolongation de leur être au monde, une résolution esthétique de leur existence au quotidien.

Aux antipodes d’un nouveau produit marketé, et à distance du simple portrait, il s’agit dans chacun de ces courts épisodes (17 mn) de tenter de défaire d’un geste les espaces formatés qui, trop souvent, réduisent la musique à internet et à ses battues publicitaires, au concert aujourd’hui considéré comme l’unique représentation du musicien en mouvement, au disque en tant qu’objet-fétiche de possession et de consommation, à la musique décorative servant d’habillage aux espaces publics. ‘Echos’ offre aux artistes un espace de parole, hors du cadre de l’interview ordinaire, de plus en plus crispé sur l’actualité à défendre, le tambour promotionnel, le communiqué de presse à rabâcher, l’idée toute faite qu’on reformule et qu’on reconduit. Ici ce qui se joue n’a que peu à voir avec la communication.

Il s’agit ici de mettre la pensée de chaque musicien·ne au premier plan, de l’écouter articuler ce qui fonde sa pratique, organiquement, conceptuellement, poétiquement, ce que celle-ci perpétue ou avec quoi elle se propose de rompre, en quoi elle s’inscrit ou non dans un territoire, une histoire, une durée. On marche, on voyage, on travaille, on digresse, la parole va son va, s’égare, se découvre, parfois s’étonne d’elle-même. Et avec la parole vient la pensée.

Les artistes visités par ‘Echos’ ont pour la plupart en commun d’abolir ou à tout le moins de flouter en leur travail, la frontière communément tracée entre ce qui relèverait de l’art et de l’artisanat, de la dépense intellectuelle et du face à face avec la matière. Superposant leur parole à l’enregistrement de leurs gestes, on réalise qu’iels ont à la fois quelque chose du menuisier, du laboureur, du semeur, du mécanicien ou du rétameur et quelque chose de l’abstracteur, du laborantin, du rêveur, du théoricien, du lanceur d’hypothèses.

‘Echos’ en écoutant la parole et les réflexions hors normes de ces musicien·nes hors-catégories invite à découvrir, penser, envisager, désirer des musiques différentes de ce que dont les médias mainstream, trop souvent, nous inondent.

A travers ces portraits fugitifs s’esquisse aussi un début de réflexion sur l’Économie et l’industrie musicale telle qu’on la connaît et telle qu’il serait souhaitable qu’on la contre, sur les habitudes de consommation induites par toute la chaine du disque et du spectacle et sur les possibilités de les modifier. ‘Echos’ en son trombinoscope hétéroclite a aussi, peut-être, quelque chose d’un petit vivier d’alternatives.

(*) écho :

1. Effet d’une onde acoustique qui parvient à un point donné, après réflexion, avec une intensité et un retard suffisants pour être perçue comme distincte de l’onde directe par un auditeur placé en ce point.
2. Lieu où se produit l’écho.
3. Ce qui reproduit ou rappelle quelque chose ; trace, marque : On retrouve dans ce film un écho des préoccupations de l’époque.
4. Information que l’on a par l’intermédiaire de quelqu’un ; nouvelles : Avez-vous eu des échos de leurs entretiens ?
5. Dans un journal, rubrique consacrée aux anecdotes, aux à-côtés de la vie politique, mondaine, etc.
6. Réponse favorable donnée à une invitation, à une proposition ; résonance : Cette offre est restée sans écho.